Vivre libre ou mourir.
C'est le reflet luisant d'une tache de lumière blanche sur le cuir noir d'une paire de rangers, le blanc veineux d'un oeil qui danse dans son orbite alors que sur la scène, L. remue ses membres et ses cheveux dans tous les sens, alors que sa peau ressemble au cuir de son blouson : cailleuse, décorée d'encre noire devenue grise avec le temps. Quel âge peut-il avoir? Et s'il pouvait comprendre. C'est la voix gueulante d'un agité félé du bocal qui, il y a quelques années, a poussé les jeunes aux révoltes et à l'hyper-activité, alors que pour moi les chansons s'assimilent à des souvenirs d'une époque ou on me lisait les histoires du père castor au coucher, ou on me chantait Porcherie! au réveil. Elle a grandit, et moi aussi, sur les mauvais chemins et c'est trés bien.
Le type est là, ses dents ont l'air d'avoir été rongé par d'autres dents, plus féroces et mieux aiguisés. Ses yeux parlent de drogue, ses mots gueulent à la débandade. Je suis au bon endroit, au bon moment, dix ans plus tard, et j'ai ton âge. En rencontrant le personnage, en lui serrant la main et les épaules, c'est mon enfance et tes blessures que je prends dans mes bras. Quelque chose se passe, la boucle d'une ceinture qu'on a laissé branlante pendant des siècles et qui aujourd'hui, s'ajuste à ma taille pour me tenir debout et me garder à l'aise. Y'a tellement de choses que j'aimerai te dire et qui sont trop cruelles et trop vraies pour que tu puisses entendre que leurs corps danse encore. C'est dans le mazout le plus compact et le plus sale qu'on trouve les sensations les plus distinctes et les plus lumineuses : Ils geulaient pour lever les coeurs et les mener vers le combat, au lieu de ça combien de poings ont relaché leurs muscles autours d'une seringue vide ? Le type est là, il sourit mais quelque part on dirait qu'il voudrait pleurer, de s'adresser à des cerveaux stupides qui prônent le plaisir avant l'évidence, et qui peut-être, n'ont rien compris.
La crète est dressée sur leur tête, du jaune d'oeuf et du sucre j'imagine. Les gens ont l'air de baigner d'une ambiance de rage et de bonheur intense alors que moi, j'ai presque envie de sucer mon pouce et de m'endormir là. Je les trouve beaux et je m'apperçois de la chance que j'ai eu de voir si tôt ces trucs si tristes, parce qu'aujourd'hui mes souvenirs ont du sens, alors qu'avant ça n'était qu'une partie de dés jetés au hasard de la vie. Et je dis merci au type, et le type me dit merci à son tour, et il y a de la bière partout sur la sol. Ca colle aux pompes.
Keeps est partie sous un ciel gris et dans une dimension étrange. Elle a semé des graines de vie dans mes pupilles, elle a réveillé des convictions qui étaient resté trop muette pendant tout cet hiver. Deux cafés, l'addition, une bise, la poésie d'un pigeon boiteux qui picore le bitume, et je fredonne avec un sourire fatigué, les paroles capiteuses de Vivre libre ou mourir. Ajourd'hui je crois qu'il fait moins froid.