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PAN! Thé mort.
22 mars 2010

Pirate

P1040411

J'ai collectioné les pilleries, les arnaques, les escroqueries de ruelles sombres. J'ai voyagé sans payer des dizaines de fois, caché dans les toilettes, à jouer aux flics et aux voleurs, j'ai toujours pris de force ce qu'on me refusait, j'ai été arr^été à plusieurs reprises, pour vol à l'étalage, pour récidive, pour dégradation des lieux publics, je me souviens d'un procureur de la République minuscule derrière un immense bureau de pin vernis et ordonné, je me souviens de la nausée d'injustice ce jour là. Je faisais du traffique de flingues en plastique, j'étais Robin des Bois dans un futal toujours trop grand. Aux controleurs de la capitale j'ai donné des fausses identités, j'ai fabulé sur des adresses, des numéros, je n'ai jamais payé le tiers de ce qu'on réclamait de moi. J'ai trainé dans des squats plus glauques que tous vos films réunis concernant la drogue et le gros plan de la caméra sur une pupille qui se dilate sous une dizaine de projecteurs, j'ai jamais aimé ces foutus films, j'ai marché sur les rails obscures du Métropolitain, j'ai frolé son métal et j'ai senti la chaleur tiède de l'air qu'il déplaçait avec toute sa vitesse, je me suis faite disputé cent fois, mille fois pour mauvaise conduite, ou pour élégance outrageuse. J'ai mangé de la kétamine et j'ai vu les lois de la perspective s'abolir subitement, j'ai mangé des trucs blancs, des trucs roses, j'ai fumé de l'africaine en Afrique et de la thaïlandaise à Paris, j'ai rencontré des étoiles écorchées en plein coeur, j'ai passé des nuits blanches à fair palir une aspirine, j'ai aimé à en perdre le coeur la raison et le reste. J'ai souvent tout quitté par soucis d'experience, je voulais connaître le pire, j'ai dis oui partout ou il fallait dire non, j'ai appris des choses qu'aucune école n'osera jamais apprendre et qui étaient plus vraies et plus concrètes que Pythagore et Oxymore. J'ai chourré des livres, des jouets par centaines, j'ai chourré pour rire et parfois pour vivre, je me suis retrouvé seule dans des rues effrayantes, j'ai vomi mes tripes dans des coins insensés, à des heures indéçentes. J'ai défié le temps en personne, j'ai déchiré mes draps, j'ai embrassé des filles là ou seuls les garçons peuvent le faire, j'ai surtout marché à l'envers, j'ai rendu les gens dingues, j'ai crevé des yeux, j'ai cassé une dent. Je me suis réveillé dans des endroits ignobles, réveillé dans des lieux magiques, j'ai provoqué le réel et j'ai gagné, perdu, encore gagné, et caetera. J'ai fais du stop sous la flotte avec mon sac à dos comme seul copain, j'ai décoloré mes cheveux jusqu'à la mort du bulbe, j'ai vécu dans la crasse et la poussière d'étoile, j'ai participé à des actions pires que dadaïstes, pire que surréalistes, j'ai voulu dire la vérité là ou visiblement personne ne veut la dire, j'ai fais des choses ignobles dont je me souviens bien et des choses merveilleuses que j'ai du oublier. J'ai menti comme un rat d'égout quand ça me faisait rire, j'ai flirté avec des personnages qui n'existent pas et qui m'ont fait mourir d'amour, j'ai bu des grands verres de littératures et j'en suis restée saoule, je suis allé tirer par la manche des personnages qui devaient absolument croiser mon chemin. J'ai participé à la mort d'un petit garçon aux cheveux noirs, j'ai nourris et logé des inconnus parce que ça me semblait plus juste que n'importe quelle connerie humanitaire, j'ai payé cher le prix de mes rêveries. J'ai sauté sur le toit des voitures, j'ai dansé sur beaucoup de tables, j'ai inversé littéralement l'ordre de choses et maintenant je sais qu'autre chose est possible.

Maintenant il est quinze heure et par soucis d'indépendance je me retrouve ici, dans une gentille ville, adorable, pleine de trucs et de machins, seule comme un cafard dans une boite de conserve, avec des vêtements propres et une vie plus saine que le fleuve du même nom, une vie avec des vitamines, des légumes frais, des projets, des ambitions, une vie avec du travail, des principes et de la rigeur, une vie sans rendez-vous le soir et sans rien qui colle aux pieds quand on marche. Je m'emmerde à mourir. Vous comprenez? On se fait chier. Est-ce que vous comprenez à quel point on peut se faire chier dans manège schématique ? On s'emmerde, on s'engourdie, on crève d'ennui on crève d'ennui on crève d'ennui. Et maintenant je sais précisément ce qu'est la vie, ainsi que tout ce qu'elle n'est pas, et maintenant je peux dire que j'avais raison, que je n'ai pas changé d'avis, que je compte m'obstiner encore sur le mauvais chemin parce que : Quand j'serais grand, j'serais pirate.

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Commentaires
L
Un ptit moment que j'avais pas fait un tour ici, et en fin de compte, je reviens pile au bout moment. Parce que tes aventures et tes écrits parlent tjrs autant, et tjrs quand il faut.
M
Tu l'es déjà, à ton échelle.<br /> <br /> Si un jour tu as du temps à Paris, viens donc faire un tour dans le Bateau Pirate, il y a de l'herbe autour et du soleil..
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